Tout Savoir sur les Limites Planétaires
Les limites planétaires, un concept clé dans la compréhension de la santé globale de notre planète, suscitent à la fois fascination et préoccupation. Elles sont fréquemment utilisées par les politiques dans leurs discours mais aussi dans les rapport du GIEC pour évaluer la situation écologique.
Alors que 2024 vient tout juste de débuter, faisons un point sur les limites qui ont déjà été dépassées et les perspectives du concept.
Qu’est-ce qu’on appelle “limites planétaires” ?
“Le concept des limites planétaires est une méthode d’évaluation et de suivi des changements environnementaux provoqués par l’homme et susceptibles de menacer la stabilité des écosystèmes. En mettant en évidence des signaux d’alerte, ce concept définit les conditions pour préserver un "espace de vie sûr pour l'humanité".”
Un concept établi en 2009
C’est en 2009 que le concept de “limites planétaires” a été développé par des chercheurs de l’Université de Stockholm en Suède. Ces limites définissent les frontières à ne pas franchir pour que la Terre puisse opérer sans subir des dommages irréversibles. En effet, leur dépassement conduirait à un basculement des équilibres planétaires.
A quoi servent-elles ?
A quel point sommes-nous en train de perturber l’équilibre terrestre? C’est notamment pour répondre à cette question qu’il est intéressant de se pencher sur le concept de limites planétaires.
Il est également crucial d’avoir en tête que ces 9 limites sont interconnectées. En ce sens, une potentielle solution innovante pour l’un des 9 points peut mettre en péril une ou plusieurs des autres limites.
Prenons l’exemple des agrocarburants : ils permettent certes de limiter le changement climatique en remplaçant l’essence mais une utilisation généralisée de ces nouveaux carburants entraînerait un potentiel dépassement de la limite d’utilisation des sols pour cultiver suffisamment de produits agricoles pour les produire.
Bilan 2024 : quelles limites déjà dépassées ?
Les neuf limites planétaires définies par les scientifiques suédois sont les suivantes :
Le changement climatique
L’érosion de la biodiversité
La perturbation des cycles de l'azote et du phosphore
Le cycle d’eau douce
L’appauvrissement de la couche d'ozone
L'acidification des océans
Les changements d'usage des sols
La pollution atmosphérique
La pollution chimique
Alors que 6 des 9 limites ont déjà été dépassées en septembre 2023, les 3 restantes (l’acidification des océans, l’appauvrissement de la couche d’ozone et la pollution atmosphérique) sont en cours de dégradation et seront franchies à défaut d’actions à l’échelle mondiale.
Un concept qui fait débat
Tout d’abord, le concept de limites planétaires est loin d’être le seul indicateur utilisé pour évaluer l’impact des activités humaines sur l’environnement. Parmi les outils défendus par la communauté de scientifiques, on retrouve également la notion de “Jour du Dépassement”. Ce dernier marque la date à laquelle l'humanité a consommé l'ensemble des ressources que la Terre peut régénérer au cours d'une année. C'est le jour où notre empreinte écologique dépasse la capacité de la planète à se régénérer. En résumé, les limites planétaires se concentrent sur les seuils environnementaux à ne pas dépasser pour maintenir la stabilité écologique, tandis que le jour du dépassement met en évidence la surconsommation annuelle de ressources par l'humanité. Il ne faut donc pas confondre ces deux concepts complémentaires.
De plus, le concept de limites planétaires admet des limites intrinsèques. En effet, comme elles sont par définition établies à l’échelle de la planète toute entière, il est délicat de les appliquer à des échelles régionales et locales. Par ailleurs, certains scientifiques ont cherché à enrichir le concept de limites planétaires en y ajoutant les besoins humains. C’est le cas de l’économiste K. Raworth avec la “Théorie du Donut”, qui établit une zone durable pour l’humanité entre le "plafond" des activités humaines, qui correspond aux limites planétaires et le "plancher" qui représente les besoins humains.
Et le bâtiment durable dans tout ça ?
Les limites planétaires sont facilement applicables au domaine du bâtiment durable. On retrouve les pratiques durables à mettre en place pour décarboner et rendre plus résilient le secteur du bâtiment à travers chacune des 9 limites. En alignant les principes du bâtiment durable sur les neuf limites planétaires, il devient possible de minimiser l'empreinte écologique de l'urbanisation croissante. Par exemple :
Changement climatique
L’architecture durable met en œuvre diverses pratiques visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre et à accroître l'efficacité énergétique : utilisation de matériaux à faible impact carbone, systèmes CVC (Chauffage; Ventilation, Climatisation) de moins en moins consommateurs d’énergie…
Biodiversité
Les projets de construction durable s'efforcent de favoriser un impact positif sur la biodiversité en adoptant des pratiques telles que la préservation des habitats naturels, la limitation de la pollution sonore et lumineuse et la conception de paysages favorables à la faune via des corridors écologiques par exemple.
Cycle de l'azote et phosphore
La gestion des eaux usées dans les bâtiments durables intègre des systèmes de traitement efficaces pour éviter la pollution des sols et des eaux, contribuant ainsi à respecter les limites liées au cycle de l'azote et du phosphore.
Changements dans l'utilisation de l'eau douce
Les bâtiments durables intègrent des systèmes de gestion de l'eau, tels que la collecte des eaux de pluie et des technologies d'économie d'eau, pour répondre aux besoins humains tout en respectant la limite d'utilisation de l'eau douce dite de source .
Ozone stratosphérique
L'élimination progressive des substances appauvrissant la couche d'ozone dans les matériaux de construction s'inscrit dans l'engagement des pratiques durables, participant à la protection de la couche d'ozone. De plus, les bâtiments durables favorisent un emplacement au plus proche des réseaux de transport en commun afin d’assurer une bonne connectivité du site. Par conséquent, le besoin en véhicules à combustion diminue et les conséquences néfastes de ces véhicules sur la couche d'ozone sont limitées.
Acidification des océans
Le phénomène d’acidification des océans est notamment dû à l’accumulation de CO2 emmagasiné dans les océans. En minimisant les émissions de gaz à effet de serre et en promouvant des pratiques de construction respectueuses de l'environnement, les bâtiments durables contribuent à réduire les impacts indirects sur les océans, préservant ainsi la biodiversité marine.
Utilisation des sols
Les projets de construction durable privilégient souvent la réhabilitation des sites plutôt que l'expansion sur des terres vierges, contribuant à préserver la biodiversité et à respecter la limite liée à l'utilisation des sols.
Pollution atmosphérique et chimique
Les normes et les technologies de construction durables visent à réduire les émissions d'aérosols et de polluants atmosphériques, contribuant ainsi à améliorer la qualité de l'air local. En effet, en privilégiant des matériaux pauvres en émission et en favorisant les sites proches des transports en commun, les bâtiments durables permettent de limiter la pollution atmosphérique et chimique en diminuant le besoin de véhicules à combustion par exemple.
Conclusion
Avec cet article, nous avons cherché à démystifier le concept des limites planétaires, à identifier les domaines où ces seuils cruciaux ont été franchis, et à analyser les débats entourant cette notion complexe. En mettant en lumière ces réalités souvent alarmantes, nous sommes appelés à réfléchir sur notre impact sur la Terre et à envisager des solutions novatrices pour préserver l'équilibre délicat de notre écosystème mondial.
Bien que planétaires par définition, les 9 limites sont applicables à l’échelle locale et à des secteurs en particulier. Dans le cas du bâtiment durable, il est judicieux de garder en tête ces limites planétaires afin de guider les initiatives de construction durable et réorienter l'industrie du bâtiment vers des pratiques plus respectueuses de l'environnement. Utiliser de façon intelligente ces indicateurs permet d’identifier les “fausses bonnes” solutions et ainsi d’éviter l’effet rebond lié à certaines innovations technologiques.
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